Alexis Lavoie – Faits divers – 6 avril au 30 avril 2017

Faits Divers FD/0.18, 2017, Huile sur toile, 20 x 25cm

 

À travers trois ensembles d’œuvres récentes, Alexis Lavoie provoque des rencontres entre optimisme et nihilisme, entre angoisse et insouciance, entre abstraction et représentation. Des espaces inquiétants y accueillent les traces défraichies d’un passé glorieux, voire les résidus prémonitoires d’une catastrophe anticipée.

Les petits tableaux de la série Faits divers, qui donne son titre à l’exposition, sont peints alla prima, en une seule session de travail de deux ou trois heures. Les accidents, les décisions prises sur-le-champ éloignent les tableaux de leurs images sources, opérant par le fait même une distorsion sur le monde que l’on connaît. Pour certains d’entre eux, Lavoie s’applique à une représentation détaillée, alors que d’autres affichent des formes plus sommaires. Souvent, la dilution de la matière picturale crée un flou qui évoque autant l’image hors foyer, qu’elle soit photographique ou filmique, que les souvenirs diffus.

Plusieurs tableaux empruntent leurs sujets à des photographies trouvées sur Internet ou prises par l’artiste. Pour d’autres, des plans spécifiques proviennent de films de Larry Clark ou de Robert Morin, par exemple. Des images iconiques, notamment celle de Neil Armstrong marchant sur la lune, côtoient des références à la culture populaire, comme les bonhommes Carnaval ou les clowns. C’est dans leur addition, dans leur mise en relation que ces sujets éclectiques prennent tout leur sens. Scènes pathétiques de moments de détresse, visions cauchemardesques d’une Amérique déchue, les tableaux mettent en forme un malaise, une incertitude symptomatique du monde contemporain. Les symboles du bonheur ou de la fête sont mis en doute par la matière picturale qui obstrue certains visages, fige les maladresses et plonge les portraits dans une atmosphère inquiétante. Pourtant, çà et là, l’humour et la compassion percent, de sorte que la série oscille constamment entre espoir et désillusion, entre cruauté et résilience.

D’emblée, les ciels de la série Jardins étonnent par leurs couleurs acidulées qui renvoient autant aux explorations colorfield de la peinture moderne qu’aux dégradés créés numériquement. Alexis Lavoie construit des paysages désolés où les figures humaines sont absentes. Les déchets et débris épars évoquent une certaine catastrophe. Celle-ci est-elle imminente ou passée? Les verts, orangés, bleus et rouges qui illuminent l’horizon sont-ils les signes d’un optimisme démesuré ou les conséquences d’un incident nucléaire?

L’incertitude qui marque la série Faits divers trouve ici écho dans les espaces mis en scène par Lavoie où se superposent les temporalités, alors qu’un obélisque est érigé à proximité d’un module de jeu pour enfants et qu’un divan antique cohabite avec une chaise de jardin. À plusieurs endroits, la nature semble renaître au cœur d’espaces désertés. Ou, plutôt, est-ce que ce sont les derniers spécimens d’une planète en train de succomber au réchauffement climatique qui sont ici représentés? Au sein des tableaux, des sections plus détaillées sont juxtaposées à d’autres sections où la peinture affiche davantage sa matérialité, poussant ainsi la représentation vers l’abstraction.

Quelques œuvres de la série Station, où des corps humains dénudés et fragmentés s’adonnent à des jeux énigmatiques, poursuivent sur une échelle plus intime les thèmes soulevés par les séries Jardins et Faits divers. Réalisées à partir de sessions photographiques où l’artiste agence des corps et des objets, elles suggèrent à la fois l’anonymat et la mise au silence, la célébration et le tourment, la violence et l’affection, le grave et le banal.

– Philippe Dumaine

Alexis Lavoie est né en 1980 à Montréal où il vit et travaille. Détenteur d’un baccalauréat en arts visuels et médiatiques de l’Université du Québec à Montréal (2008), il poursuit en ce moment des études de maîtrise en arts visuels à l’Université Concordia. Il remporte le premier prix au 12e Concours de peintures canadiennes de la RBC (2010). Parmi ses expositions solos récentes, mentionnons Les yeux crevés à Plein Sud (2014, Longueuil), Remplir le vide à L’Écart (2013, Rouyn-Noranda), Les dernières choses à la Maison de la culture Frontenac (2012, Montréal) ainsi que Project Room – 407 (2016) et Saisons mortes (2014) à la Galerie Simon Blais (Montréal), qui représente le travail de l’artiste. alexislavoie.com

Vernissage le 6 avril 2017 de 17h00 à 20h00 à la Galerie d’art d’Outremont

41, avenue Saint-Just, Outremont H2V 4T7

L’exposition se poursuit jusqu’au 30 avril 2017

Du mardi au vendredi de 13h à 18h

Samedi et dimanche de 13h à 17h

La GAO sera fermée le vendredi 14 avril (Vendredi Saint) et le dimanche 16 avril (Dimanche de Pâques)